Cinquante ans après la fin de la guerre d’Algérie, la Cité nationale de l’histoire de l’immigration propose avec l’exposition « Vies d’exil, 1954-1962. Des Algériens en France pendant la guerre d’Algérie », une découverte du quotidien des Algériens en France entre 1954 et 1962. L’exposition confiée à Benjamin Stora et Linda Amiri commence dans un espace vide circulaire, une rotonde très dépouillée où le visiteur voit des images de bateaux symbolisant le départ de ces exilés, ces invisibles de l’Histoire qui formèrent la population des Algériens des années 1950. On ne peut s’empêcher de rappeler dans ce lieu chargé d’histoire, né de la fusion du musée de la France d’outre-Mer et du musée de l’Homme, le rôle de ces institutions qui diffusaient dans la société civile française d’alors tout un ensemble de représentations stéréotypées des colonies françaises et de leurs populations. À la Cité nationale de l’histoire de l’immigration, l’Algérien entre au musée, mais différemment tant l’altérité y est repensée d’une autre façon. Pour la première fois et dans le cadre de cette exposition, un musée national propose de mettre en lumière l’histoire méconnue de l’immigration algérienne dont les effectifs doublent de 1954 à 1962. L’ensemble varié et rarement mis en valeur des archives privées et publiques, des photographies, les sons, les témoignages inédits et les œuvres d’art qui montrent la précarité, la violence mais aussi la joie et la nostalgie de cette population fragile et démunie. Le visiteur perçoit presque physiquement l’expérience de l’exil qui se vit dans l’engagement politique, la misère des bidonvilles, la sociabilité des cafés, les contrôles et la terrible violence policière.
Dans le livre qu’ils viennent de publier, Émile Boutmy. Le père de Sciences Po, deux descendants du frère d’Émile Boutmy, François et Renaud Leblond, s’appuient sur des manuscrits inédits découverts dans un grenier familial pour proposer un portrait très original et novateur du fondateur de l’École libre des sciences politiques (ELSP).
À l’heure où s’exprime la volonté du nouveau président de la République, François Hollande, élu en mai 2012, de refonder les relations professionnelles en s’appuyant sur des corps intermédiaires vite écartés des démarches de l’ancien chef de l’État, Nicolas Sarkozy, voilà un collectif dirigé par Michel Dreyfus et Michel Pigenet qui, par une étude de cas sur la Confédération générale du travail-Force ouvrière (CGT-FO, dorénavant FO), montre toute l’importance des politiques contractuelle et paritaire pour le modèle français, aujourd’hui en question.
Télé Gaucho (2012) est le troisième long-métrage du réalisateur français Michel Leclerc, après J’invente rien (2006) et Le nom des gens (2010). Il ne dépare pas la série et se montre aussi déjanté, fantaisiste, désinvolte, cocasse, engagé et, disons-le d’emblée, aussi réussi que les précédents. À travers les yeux de Victor, Rastignac des années 1990, jeune provincial monté à Paris pour faire carrière dans le cinéma, nous assistons à la naissance d'une chaîne de télévision pas comme les autres, télé associative, libertaire, télé de quartier pirate, en rupture avec tous les codes esthétiques et toutes les compromissions de la télé commerciale. Celle-ci est représentée par HD1, dont toute ressemblance avec TF1 ne serait pas fortuite, et le système honni incarné par Emmanuelle Béart, ici à contre-emploi dans le rôle d'une présentatrice d'une émission misant sur la bêtise et le voyeurisme des téléspectateurs. Télé Gaucho, à l'inverse, fait le pari de l'intelligence, de l’humour et de la participation active de ceux qui la regardent... et de ceux qui la font. Autour du projet se crée un collectif qui brille davantage par l'enthousiasme que par le professionnalisme, avec, en particulier, Jean Lou (Éric Elmosnino), sympathique escroc et grande gueule anar qui veut avant tout « foutre le bordel » et ne pas se laisser récupérer par le système – au point de penser à saboter le projet quand celui-ci est menacé de réussite –, Yasmina (Maïwen), féministe et gauchiste un brin hystérique qui voit avant tout dans Télé Gaucho une arme au service de la lutte sociale, Clara (Sara Forestier), jeune fille délurée qui ne sait rien faire mais veut tout apprendre, Victor, stagiaire chez HD1 mais cameraman pour Télé Gaucho... Ils produiront leurs propres bulletins d'informations, leurs fictions, leurs parodies publicitaires, leurs interviews, leurs enquêtes (faisant un grand usage du micro-trottoir), répondant au double objectif de s'amuser aux dépens des institutions et d'éveiller les consciences. Au total, le film est à l'image de son sujet : brouillon, drôle, à gauche toute, sans se prendre trop au sérieux, jamais ennuyeux.
Le Centre d’histoire de la Résistance et de la déportation (CHRD) de Lyon vient de rouvrir ses portes après un an de travaux consacrés à la transformation de son exposition permanente. Celle-ci avait besoin d’être réactualisée car elle n’avait pas été modifiée depuis la première ouverture du CHRD au public en 1992. Les locaux, historiques, qui constituent le cadre de cette exposition, restent identiques. Il s’agit d’un étage de l’aile ouest de l’ancienne école du service de santé militaire qui a servi de siège à la Gestapo durant
En 2012, les Éditions Montparnasse ont fait paraître en DVD la trilogie du réalisateur autrichien Alex Corti (1933-1993), Welcome in Vienna (trois volets sortis en 1981, 1985 et 1986). D’après un scénario de Georg Stefan Troller (né à Vienne en 1921), dont la vie a inspiré les trois parties, cette fresque de six heures dépeint le parcours dramatique, de 1938 à 1945, de juifs viennois condamnés à l’exil.
Avec « L’Art en guerre », Jacqueline Munck et Laurence Bertrand Dorléac signent une magnifique exposition sur les arts en France entre 1938 et 1947. D’une exposition surréaliste à l’autre, les artistes dans la guerre puis sous l’Occupation produisent-ils un art en guerre ? Pas de réponse facile ni univoque dans cette exposition qui présente avec raffinement les subtilités et les contradictions de la scène artistique de cette décennie hors norme. Pour cela, les commissaires ne choisissent pas entre histoire et histoire de l’art ; elles prouvent au contraire la nécessité de les lier intimement.
Le 16 novembre 2012, l’Association Georges Pompidou (AGP) et le Centre d’histoire de Sciences Po (CHSP) organisaient une journée d’études consacrée à « Georges Pompidou et la jeunesse ». Les trois initiateurs (Gilles Le Béguec,
Le 10 septembre 2012 était inauguré le Site-Mémorial du camp des Milles, soixante-dix ans après que le dernier convoi d’internés a quitté les lieux pour s’engager sur les voies de l’extermination. À cette occasion, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, accompagné de sept ministres, souligna que « l’histoire des Milles est une histoire française ». Il s’inscrivait ainsi, par-delà les clivages politiques, dans la continuité du discours du président Chirac qui, le 16 juillet 1995, reconnaissait pour la première fois, sur les lieux de l’ancien Vélodrome d’hiver, la responsabilité de la France dans la déportation des juifs. C’est d’ailleurs un « Vel d’Hiv du Sud » qu’évoqua dans son discours inaugural, Alain Chouraqui, directeur de recherches au CNRS et président de la « Fondation du Camp des Milles - Mémoire et Éducation », afin de souligner l’analogie historique et mémorielle entre la rafle parisienne du 16 juillet 1942 et le camp situé à quelques kilomètres d’Aix-en-Provence où les autorités françaises internèrent, entre 1939 et 1942, 10 000 personnes dont 2 000 furent envoyés vers le funeste camp d’Auschwitz.
L’environnement guerrier constitue, quels que soient la période, le type de conflit ou d’armée, un champ d’investigation toujours riche et fascinant pour aborder la question des émotions. L’expérience du combat suscite chez les acteurs de la bataille une gamme d’affects surgis parfois simultanément : détresse, angoisse, peur, lassitude, haine, mais aussi affection ou amitié.
Comprendre l’essence de ce mélange, fruit de l’activité guerrière, constitue le cœur de Au combat : réflexions sur les hommes à la guerre. Son auteur, Jesse Glenn Gray, est parti de son expérience personnelle en tant que combattant de l’armée américaine pendant la Seconde Guerre mondiale. Gray, âgé alors de 28 ans, reçut le 8 mai 1941, dans sa boîte aux lettres, deux documents : son diplôme de doctorat en philosophie de l’université de Columbia, et un appel d’incorporation immédiate dans l’armée américaine.
Officier dans l’infanterie, Jesse Glenn Gray a participé à plusieurs opérations militaires en Europe pendant le second conflit mondial : campagne d’Italie, débarquement en Provence, campagne d’Alsace, puis d’Allemagne. Tout en étant conscient de participer à une expérience historique exceptionnelle, le jeune philosophe prenait régulièrement des notes sur ses carnets dans lesquels il transcrivait impressions, réflexions et sentiments. Il y décrivit les batailles de la libération de l’Europe, les rapports avec les civils, et aussi la dénazification de l’Allemagne durant laquelle il servit comme sous-lieutenant au contre-espionnage. En octobre 1945, il était démobilisé.