Consacrer un livre au Parti socialiste unifié (PSU) n'était pas une tâche aisée. Cet éphémère parti (1960-1989) a toujours représenté un véritable casse-tête pour les journalistes et les historiens en raison des fortes divisions qui l'ont animé, alors même qu’il a déployé une hyperactivité dans divers domaines.
Pourtant c'était une œuvre nécessaire pour mieux comprendre comment, malgré sa marginalité apparente (il n'a conquis guère plus de 3 % de l'électorat et a obtenu à peine quelques élus nationaux, tout en déployant un large tissu d'élus locaux), ce parti a exercé une influence tant intellectuelle (il suffit pour s'en convaincre de citer les noms de François Furet, Emmanuel Leroy Ladurie, Pierre Rosanvallon, Patrick Viveret) que programmatique (autogestion, pacifisme, critique du nucléaire, écologie politique), comme en témoigne l'ouvrage par son approche thématique. Pionnier le parti l'a été dans plusieurs secteurs, défrichant des problématiques encore confidentielles à l'époque comme l'émancipation des femmes (
Surtout l'ouvrage se situe parfaitement dans le renouvellement de l'approche des partis politiques, croisant histoire politique, histoire culturelle et histoire sociale. L'ouvrage relie d'ailleurs pour chaque période de son histoire le parti aux évolutions sociales qui lui sont contemporaines (article de Ludivine Bantigny consacré aux jeunes au PSU, article de
Mais les événements ne sont pas pour autant oubliés. Le PSU a ainsi joué un rôle central dans la mobilisation pour la décolonisation (article de
Tous ces sujets sont d'ailleurs abordés sans redite et sans empiéter sur les travaux précédents, rassemblés notamment dans l’ouvrage Le PSU vu d'en bas [1] . Le livre ici présenté, Le Parti socialiste unifié. Histoire et postérité, et le colloque qui l'a précédé exploitent en outre un large panel de sources désormais à la disposition de l'historien soucieux de poursuivre ces recherches. D'abord le fonds du PSU qui n'avait été jusqu’alors que peu exploité, à l'exception de la thèse de
Le très intéressant article comparatif de Roberto Colozza (« Socialismes face à face. Les cas du Parti socialiste unifié et du Partito Socialista italiano di unità proletaria ») nous permet néanmoins de penser qu'une analyse plus internationale aurait permis de comprendre en quoi le PSU s'inscrit dans un mouvement plus global de redéfinition de
En outre, si les campagnes sont ici étudiées au travers des articles d'Alain Bergounioux, de
Pour bien cerner l'impact du PSU sur le reste de la gauche et en particulier comme lieu de socialisation d'une bonne partie de futurs leaders tant écologistes que socialistes, une étude prosopographique serait particulièrement pertinente, comme le souligne Marc Lazar.
Enfin, l'approche très thématique adoptée par cette étude du PSU néglige peut-être un peu les rapports de force au sein du parti que de nouvelles sources permettront d'éclairer (fonds Jacques Heurgon conservé à l’Institut Tribune socialiste, fonds Michel Rocard conservé aux Archives nationales 680AP, ainsi que le fonds Michel Rocard conservé à Conflans-Sainte-Honorine et recouvrant la période 1967-1980). Même si les réflexions sur le multipositionnement des militants PSU transparaissent à plusieurs reprises dans l'ouvrage, des études sur les rapports entre le PSU et les syndicats (CFDT, FO, CGT) et les associations (ADELS, GAM, clubs) restent encore à faire. Cela amènerait par exemple à s'interroger sur la notion de « deuxième gauche ».
Du point de vue des sources, on regrettera l'absence des témoignages qui avaient émaillé le colloque, même si leur publication aurait bien sûr rendu le présent ouvrage extrêmement volumineux.
[1] Tudi Kernalegenn,
[2] Fabrice d'Almeida, Images et propagande, Paris, Castermann, 1995.
[3] Le PSU s'affiche. 30 ans d'affiches politiques, Paris, Éditions Bruno Leprince, 2013.